"De Pierre Lods à Docta : Médina, la cité muse"
Mansour Ciss Kanakassy
(Né en 1957)
Mansour Ciss dit Kanakassy est né en 1957 à la Médina, en plein cœur de la ville de Dakar.
Il a suivi les cours à l’INAS (Institut National des Arts du Sénégal) entre 1973 et 1977. Il fréquente ensuite la section sculpture de l’Ecole Nationale des Beaux-arts et en sort diplômé.
Mansour Ciss a profité très jeune de l’effervescence culturelle qui animait son quartier de la Médina. Il assistait ainsi quotidiennement aux animations pluridisciplinaires organisées dans les cénacles d’artistes et d’intellectuels tels Issa Samb (plus connu sous le nom Joe Ouakam) et Youssufa Dione du Laboratoire Agit Art, sans oublier aussi les rencontres périodiques « TENQ », initiées par l'artiste El Hadji Sy.
Cette période est celle du renouveau culturel de Dakar après le déroulement en 1966 du premier Festival des Arts nègres de Dakar dont « la véritable signification était la suprême démonstration de la pensée nègre dans ses expressions esthétiques » selon Gallo Thiam.
Ainsi, le champ d’action artistique de Mansour Ciss s’est très tôt manifesté par une double volonté, d’ouverture et d’élargissement de son art. Le contact avec ses aînés lui a permis de repérer différentes approches, orientations, d’obtenir des recommandations, avant d’entrer à l’Institut National des Arts du Sénégal en 1973, pour y parfaire une formation artistique pendant quatre ans.
Dans le cadre d’une exposition en 1978 à Dakar, le Président Senghor, lui achète sa toute première collection de sculptures. Ce contact va permettre au jeune artiste Mansour de s’ouvrir à d’autres horizons. En effet, le Président Senghor invite Mansour à participer à une exposition itinérante internationale intitulée « Itinéraire de l'Art Sénégalais contemporain ». Cette exposition collective est alors présentée à Mexico, Atlanta, Washington, puis enfin à Boston. Pour Mansour Ciss, c’est le début d’une carrière internationale et d’une participation à de nombreux salons, symposiums et colloques internationaux.
Les chemins d’une quête
Dans la quête sur les diversités culturelles, Mansour s’intéresse à l’Afrique. Un périple va le mener au Burkina Faso, au Cameroun, au Niger, au Bénin, en Algérie, au Maroc ou encore en Tunisie. Il se rend en 1984 au Mali et y séjourne encore de 1989 à 1993.
Ces longs séjours lui permettent de s’imprégner des différentes facettes des cultures Bambara, Bobo et Dogon. Il décide ensuite d’aller s’installer à Berlin. Dans la capitale allemande, sa connexion avec le groupe d’artistes dénommé « Rundeck », n’effacera en rien sa culture africaine. Bien au contraire, elle l’a aidé à valoriser son africanité. D’où sa démarche artistique telle qu’il le manifeste actuellement avec la Globalisation.
Le Laboratoire Déberlinisation
Mansour Ciss Kanakassy s’est indigné comme nombre d’intellectuels et artistes de la fameuse conférence de Berlin tenue entre novembre 1884 et février 1885, qui a vu le partage inéluctable de l’Afrique.
Pour lui : « De toute l’histoire du continent africain, il faut retenir que cette conférence nous a dépouillés de nos us et coutumes, d’une partie de notre solidarité, de notre culture, de nos richesses, de tous nos acquis. C’est pourquoi, nous africains, la seule préoccupation que nous devons avoir, après que nous ayons manifesté notre amertume, notre indignation, notre frustration aussi, est de définir une nouvelle stratégie de lutte pour restituer à l’Afrique sa dignité, ensemble bâtir un meilleur futur». En substance, ce message clair traduit à sa juste valeur le rapport affectif et passionnel que l’artiste Mansour Ciss a toujours entretenu avec le continent africain. C’est là d’ailleurs, que réside toute la mission du Laboratoire Déberlinisation.
La démarche du concept de Déberlinisation est de susciter des rencontres symboliques qui permettront aux artistes africains et de la diaspora de participer activement à l’Histoire de l’Art ; et en même temps, d’offrir à un large public la possibilité de s’informer, d’accéder plus aisément à la compréhension de la création artistique contemporaine.
En somme, le Laboratoire Déberlinisation est un espace de liberté qui ambitionne d’aider les artistes africains, quelque soit leur lieu de résidence, à réfléchir sur des projets et concepts culturels non encore défrichés, donc vierges.
Depuis le début de sa carrière internationale, Mansour Ciss Kanakassy est un artiste engagé sur les grands combats qui interpellent les pays africains, et plus généralement les pays du Sud. Le concept de Déberlinisation ainsi que celui de l’Afro pour la création d’une monnaie unique sur son continent, monnaie adossée à l’Union des États-Unis d’Afrique illustrent sa position.
Mansour Ciss développe par ailleurs des liens intenses de collaborations artistiques avec les continents africain et asiatique. Il a présenté dans le cadre de la 12èmeBiennale d’Art contemporain, Dak’Art, « Stand-Up » en partenariat avec Bandjoum Station de Barthelemy Togo du Cameroun et le Centre d’art contemporain d’Essaouira de Mostafa Romli. Cette exposition internationale des collections de ces trois centres d’art implantés sur le continent démontre la vitalité de la création contemporaine en terre africaine.
Lors de cette édition 2016 de Dak’Art, il a présenté également au Grand Théâtre de Dakar une exposition internationale intitulée « Green Power 54 +1 », en collaboration avec des artistes chinois. Cette exposition s’inscrit dans sa démarche de développement de partenariats avec les Pays du Sud.
Mansour Ciss vit et travaille à Berlin, en Allemagne, et développe également des projets au Sénégal au sein de son Centre d’Art Contemporain, La Villa Gottfried, à Ngaparou, près de Mbour. Ses œuvres ont été exposées partout dans le monde. À noter que Mansour Ciss a été co-lauréat du grand prix Léopold Sédar Senghor, lors de l’édition de la Biennale « Dak’art 2008 ».